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Mines

Les dépôts quaternaires du Québec : une couche sédimentaire riche et au cœur d’enjeux majeurs

Mercredi le 20 novembre 2024

Salle 403

Organisation

Hugo Dubé-Loubert

MRNF

Organisation

Simon Hébert

MRNF

Le territoire québécois est couvert en très grande partie par différents types de dépôts dont la genèse est inhérente à l’évolution et l’activité de l’Inlandsis Laurentidien.

Cette couche, dont l’épaisseur et les caractéristiques sédimentologiques sont très variables, témoigne des épisodes importants ayant ponctué le dernier cycle glaciaire et de la déglaciation subséquente.

Frein à l’exploration minérale pour certains, précieuse zone de recharge pour les aquifères de surface pour d’autres, cette couche offre de multiples usages et défis dans la gestion du territoire et des ressources.

La pluralité des activités de recherche traitant des dépôts quaternaires traduit l’importance et la richesse de ces enregistrements pour le territoire québécois. Cette session de conférences offrira l’occasion d’explorer différentes thématiques de recherche portant sur ces enregistrements sédimentaires, notamment sur la prospection minérale, les risques naturels et les études paléoclimatiques et hydrogéologiques. 

13 h 30

Mot de bienvenue

13 h 35

Application du laboratoire mobile pXRF aux levés géoscientifiques du Quaternaire : un outil de prospection glaciosédimentaire

Détails de la conférence

La dynamique glaciaire complexe des régions septentrionales du Québec a laissé une épaisse couche de sédiments qui masque en tout ou en partie le socle rocheux, limitant ainsi l’exploration minérale. Les levés et les analyses géochimiques de l’environnement secondaire permettent d’obtenir un aperçu rapide et global du potentiel minéral de ces régions. Cependant, les analyses géochimiques en laboratoire représentent un coût important et les délais pour l’obtention des résultats peuvent compromettre la réactivité des équipes de terrain et le suivi des secteurs anomaux.

Le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) réalise annuellement des levés du Quaternaire alliant échantillonnage et cartographie des dépôts de surface. Afin d’augmenter ses capacités analytiques et de maximiser la portée des levés, les procédures décrites dans le guide « Utilisation du pXRF pour l’analyse des dépôts de surface et introduction au laboratoire mobile du Quaternaire du MERN » (Hébert et al., 2021; MB 2021-04) ont été utilisées pour obtenir des résultats de géochimie in situ dans le cadre de travaux en milieux isolés. Cette présentation fait suite au déploiement du laboratoire pXRF lors des travaux de terrain de la Direction de l’acquisition des connaissances géoscientifiques (DACG) effectués au nord de la péninsule d’Ungava (Nunavik) en 2022 et 2023.

La mise en œuvre du laboratoire mobile pXRF avait pour objectif de valider le déploiement et l’utilité de cette nouvelle approche et son intégration aux travaux de terrain. De plus, cette étape devait permettre de tester le protocole analytique établi et de valider les paramètres de calibration de l’analyseur pXRF. Au cours des étés 2022 et 2023, le laboratoire mobile a permis l’analyse de 265 et 118 échantillons respectivement.

Les données géochimiques de sédiments obtenues par pXRF ont fait l’objet d’une analyse statistique comparative avec les analyses conventionnelles afin de déterminer la précision et l’exactitude des éléments pour les fractions granulométriques < 125 μm et < 63 μm. Les résultats ont permis de cibler différentes zones présentant un potentiel minéral intéressant, facilitant ainsi un échantillonnage secondaire plus détaillé. Les méthodes d’interpolation spatiale des zones ciblées ont également été analysées en comparant les interpolations brutes aux interpolations en données de composition. Un aménagement du laboratoire et un protocole adapté aux contraintes d’un camp en milieu isolé ont finalement été proposés afin d’optimiser le déploiement du laboratoire et les manipulations quotidiennes.

13 h 55

Apport de la géologie du Quaternaire à la mise en valeur du potentiel minéral de la Sous-Province de Churchill (Nunavik)

Détails de la conférence

Les basses-terres de la baie d’Ungava et les régions environnantes du Nunavik occupent une position géographique privilégiée par rapport aux centres de dispersion glaciaire formés par le Dôme du Labrador-Québec. Les enregistrements morphologiques et sédimentaires riches et variés de cette région représentent en effet des sources d’information majeures sur l’évolution, la migration et la fonte de ce secteur de l’Inlandsis laurentidien au cours du Wisconsinien et de l’Holocène.

Les différents dépôts et formes glaciaires reconnus dans ce secteur constituent toutefois un obstacle important à la recherche de minéraux économiques et de gisements. L’exploration minérale demeure en effet un défi dans les régions ayant été affectées par les grandes glaciations du Quaternaire et dont l’accès au socle rocheux est parcellaire.

Dans ce contexte, la direction de l’Acquisition des connaissances géoscientifiques du Québec (DACG) a réalisé de 2012 à 2015 un programme d’échantillonnage des dépôts glaciaires (till) et fluvioglaciaires (eskers) combiné à la cartographie des dépôts de surface à l’échelle 1/250 000 dans la partie sud-est de la Province de Churchill. Ce projet visait à évaluer le potentiel minéral régional à l’aide de la prospection glaciosédimentaire, en plus de fournir une base de connaissances géoscientifiques sur la géologie du Quaternaire régionale pouvant servir de guide aux travaux d’exploration.

À cette occasion, plus de 1000 échantillons de till et 200 d’eskers ont été prélevés et analysés par différentes techniques (géochimie de la fraction fine, analyse de concentrés de minéraux lourds, géochimie des éléments en traces par LA-ICP-MS, etc.). Ces analyses, ainsi que les traitements statistiques subséquents, ont permis d’identifier des zones à fort potentiel minéral et de caractériser certaines des minéralisations à la source de ces dispersions dans l’environnement secondaire. Un total de 39 zones favorables, d’envergure ponctuelle ou régionale, ont été définies et couvrent une grande variété de contextes de minéralisation, illustrant ainsi la diversité du potentiel minéral du Sud-Est de la Province de Churchill. Les plus notables de ces zones démontrent un fort potentiel pour des minéralisations en ETR d’origine magmatique, de même que pour des contextes géologiques de type IOCG.

14 h 15

Cartographie des dépôts de surface de la péninsule gaspésienne : apport de l’imagerie LiDAR à l’avancement des connaissances sur le Quaternaire et les ressources en eau

Patrick Lajeunesse

Université Laval

Détails de la conférence

La période du Quaternaire au Québec a été marquée par des cycles glaciaires et interglaciaires durant lesquels des inlandsis se sont formés et ont fluctué selon les variations climatiques. Ces phases d’avancée et de recul glaciaires ont laissé derrière elles une séquence sédimentaire de surface complexe. Les caractéristiques sédimentologiques, géochimiques et génétiques de ces dépôts jouent un rôle déterminant dans la dynamique des zones de recharge des eaux souterraines, principale source d’eau potable pour de nombreuses communautés du Québec. Une cartographie précise de ces dépôts est donc cruciale pour garantir une gestion durable de cette ressource essentielle. Traditionnellement, la cartographie des dépôts de surface reposait sur l’interprétation des photos aériennes, un processus complexe et imprécis en raison de l’épaisse couverture végétale dissimulant les sédiments de surface et les subtilités du terrain. De plus, cette méthode produit une cartographie de faible résolution, rendant difficile le travail des spécialistes qui dépendent de ces données. Il est aujourd’hui possible de surmonter cet obstacle grâce à la disponibilité des données provenant de levés LiDAR aéroportés. Les données topographiques ainsi acquises permettent une cartographie et une caractérisation précises et détaillées de la nature, de la répartition, de l’étendue et de la géométrie des dépôts de surface. Cette technologie joue donc un rôle majeur dans l’avancement des connaissances sur les ressources en eau et sur les paysages fortement modelés par les glaciations du Quaternaire. C’est dans cette perspective que ce projet vient s’intégrer au nouveau projet PACES Gaspésie en fournissant une mise à jour majeure de la cartographie des dépôts de surface de la péninsule. Ce projet aboutira à la production de 24 feuillets cartographiques à l’échelle 1/50 000 couvrant l’ensemble de la péninsule gaspésienne. Ces informations permettront d’enrichir substantiellement les connaissances sur le Quaternaire et les ressources hydriques de ce territoire par une meilleure compréhension de l’histoire et de la dynamique glaciaire ainsi que des produits sédimentaires de la déglaciation et de l’évolution postglaciaire du paysage. Outre l’avancée des connaissances scientifiques, cette cartographie aura des applications concrètes dans la gestion des risques naturels, comme les glissements de terrain, la planification d’infrastructures, l’exploration minière et l’évaluation des impacts environnementaux, fournissant ainsi un outil essentiel aux décideurs locaux et régionaux.

14 h 35

Pause

14 h 50

Épisodes glaciolacustre et glaciomarin du centre de l’Ungava (Nunavik) : implications pour l’histoire quaternaire et l’archéologie du nord du Québec

Détails de la conférence

Le retrait de la calotte laurentidienne dans le nord du Québec et du Labrador (Canada) a mené à la formation de plusieurs grands lacs de barrage glaciaire. Le drainage de ces lacs aurait pu influencer la circulation océanique de l’Atlantique Nord et le climat au cours de la déglaciation. L’évaluation de l’impact de ces décharges répétées d’eau de fonte sur le système océan-climat est cependant limitée par le manque de données sur la configuration (étendue et volume) et la chronologie de ces lacs glaciaires, de même que sur la position de la marge glaciaire qui a contrôlé leur évolution. De plus, l’incursion des eaux marines postglaciaires sur le territoire complexifie l’interprétation de certaines séquences de rivages qui enregistrent ces événements, notamment dans la région Centre-Sud de l’Ungava. La compréhension des processus géomorphologiques qui ont façonné le territoire est également d’intérêt pour les recherches archéologiques qui ont révélé la présence de plusieurs sites précontact témoignant de l’occupation du territoire (campements, routes migratoires, etc.) par des groupes autochtones.

Ce projet de maîtrise se penche sur les enregistrements géomorphologiques et sédimentaires de la région englobant les vallées des rivières Caniapiscau et Koksoak, au sud de Kuujjuaq (Nunavik). La cartographie des eskers, des moraines et des chenaux d’eau de fonte, effectuée à partir d’images satellitaires et de modèles d’élévation numérique, a permis de reconstruire le schéma de déglaciation régional. L’étude des paléorivages glaciolacustres et glaciomarins, deltas et terrasses a quant à elle permis d’établir la configuration respective de ces étendues d’eau. Les observations cartographiques ont été validées par des travaux de terrain qui ont également permis la prise de mesures d’élévation au GPS différentiel de haute précision (± 1 m) des formes clés le long d’un transect N-S de 170 km. La reconstruction des plans d’eau a été réalisée à l’aide d’un système d’information géographique (SIG) qui a permis d’illustrer la position des paléosurfaces et la physiographie régionale approximative au moment de leur existence (~7 ka B.P.).

Les résultats de ces travaux indiquent que les rivages reconnus dans les vallées des rivières Caniapiscau et Koksoak et dans le bassin du lac Cambrien sont majoritairement d’origine glaciomarine. La combinaison du schéma de retrait glaciaire déterminé à partir des données cartographiques et des modélisations démontre qu’un lac glaciaire s’est développé dans le sud du lac Cambrien et dans les bassins adjacents à l’est, avec une étendue d’environ 2500 km2 et un volume de 105 km3. De plus, les datations par isotopes cosmogéniques de blocs présents sur ces rivages à différentes élévations ont donné 14 âges 10Be qui indiquent que le drainage du Lac glaciaire Cambrien et l’incursion marine concomitante se sont produits aux alentours de 7200 ±200 ans B.P. L’exondation progressive du territoire causée par le rebond postglaciaire a culminé avec le retrait des eaux marines de la zone d’étude vers 4400 ±200 ans B.P.

Ensemble, ces résultats renforcent le schéma et la chronologie du retrait glaciaire dans la région pendant la dernière déglaciation, en plus de fournir un cadre chronologique à la migration et l’établissement humain dans le centre-nord de l’Ungava par les ancêtres des Naskapis. Les nouvelles datations cosmogéniques permettent également d’affiner les reconstructions paléogéographiques du sud de la baie d’Ungava, en plus de préciser la magnitude des décharges d’eau de fonte de cette région au début de l’Holocène.

15 h 10

Études et compréhension des glissements de terrain dans les argiles sensibles du Québec

Ariane Locat

Université Laval

Détails de la conférence

Le Québec a une histoire géologique qui a conduit à la formation de dépôts d’argile marine, sensible au remaniement. Selon les données du ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD), une moyenne annuelle de 213 cas de mouvements de terrain impliquant les sols et le roc a été signalée entre 2010 et 2023 par la Sécurité publique (MSP) et transmise pour avis au MTMD, dont 197 sont survenus dans les sols. Entre 2017 et 2023, cette moyenne annuelle a augmenté à 276 cas, dont 256 dans les sols.

Dans ce contexte, le MSP, le MTMD et le Laboratoire d’études sur les risques naturels de l’Université Laval participent à un programme de recherche sur les géorisques naturels. Ce programme, financé dans le Cadre de prévention des sinistres et du Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques du gouvernement du Québec, poursuit les objectifs suivants : 1) améliorer les connaissances sur les géorisques et leurs conséquences en lien avec les changements climatiques, afin de mieux planifier l’utilisation du territoire dans les zones exposées aux mouvements de terrain, 2) établir les meilleurs choix d’intervention pour la prévention et l’atténuation des risques et 3) former du personnel hautement qualifié pour assurer la gestion des problématiques liées aux mouvements de terrain.

Cette présentation introduit les principaux axes du programme de recherche et offrira un aperçu des types de glissements de terrain qui touchent ces dépôts d’argile sensible, dont les glissements rétrogressifs. Ceux-ci se divisent en deux principaux types : les coulées argileuses et les étalements. Les coulées argileuses surviennent lorsque l’argile sensible remaniée s’écoule à la suite d’une succession de ruptures circulaires, laissant une cicatrice presque vide. Les étalements se produisent lorsqu’une surface de rupture se propage quasi horizontalement dans un massif argileux intact, disloquant le sol sus-jacent en blocs plus ou moins intacts qui forment des horsts et des grabens dans la cicatrice du glissement. Les conséquences de ces deux types de glissements peuvent être désastreuses pour la population et les infrastructures, considérant leur grande superficie et la rapidité à laquelle ils se produisent. Des exemples de cas seront utilisés pour décrire la morphologie particulière, les mécanismes de rupture associés à ces glissements et leurs conséquences. Les principaux outils disponibles afin de mieux comprendre et analyser ces glissements seront décrits. Finalement, les enjeux prioritaires et les perspectives de recherche concernant ces glissements de terrain seront aussi discutés.

15 h 30

L’enclave argileuse du Nord-Ouest (NW) québécois et du Nord-Est (NE) ontarien : mise à jour de nos connaissances de la géologie de surface dans un contexte d’adaptation aux changements climatiques

Pierre-Marc Godbout

Commission géologique du Canada

Détails de la conférence

L’adaptation et l’atténuation des risques liés aux changements climatiques présentent à la fois des défis et des occasions. L’enclave argileuse (EA) du NW québécois et du NE ontarien, une vaste région de sols fertiles à fort potentiel agricole et forestier dont le facteur limitatif est le faible nombre de jours sans gel, pourrait connaître de profonds changements associés au réchauffement du climat. Le Groupe OURANOS prévoit qu’une augmentation de 2,9 °C de la température annuelle moyenne pourrait être atteinte dans la région d’ici 2050. Le réchauffement anticipé pourrait ainsi favoriser la production maraichère et prolonger la saison de croissance qui permettrait la culture de maïs et de soya, actuellement restreinte aux abords de grands plans d’eau, sur de grandes superficies. Toutefois, les prévisions d’OURANOS montrent également que les étés plus chauds de 2050 seront accompagnés de précipitations comparables à celles d’aujourd’hui, ce qui laisse présager de sérieux déficits hydriques.

Les évaluations actuelles de l’étendue de l’EA utilisée par les spécialistes des milieux agricole et forestier varient beaucoup selon les auteurs. Il importe donc dans un premier temps d’établir la répartition des dépôts de surface de l’EA et de déterminer leurs propriétés physiques et géochimiques. La plaine argileuse du NE québécois et du NE ontarien est ponctuée d’affleurements rocheux, de dépôts glaciaires, fluvioglaciaires, glaciolacustres, de crues glaciaires et de dépôts postglaciaires dans une proportion qui peut être quantifiée grâce aux cartes numériques de dépôts de surface produites par la Commission géologique du Canada (CGC), celle de l’Ontario (OGS) et du ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MNRF). De plus, dans un contexte de réchauffement climatique entraînant un déficit hydrique, l’accès à l’eau souterraine devient prioritaire, d’où la nécessité d’identifier avec précision les zones de recharge et les aquifères captifs. Une coopération étroite avec le Groupe de recherches en eau souterraine (GRES) de l’UQAT et autres organismes québécois et ontariens s’avère donc nécessaire dans la poursuite de ces objectifs. Le document final fournira des données géoscientifiques exhaustives qui contribueront à une meilleure connaissance du milieu, laquelle est essentielle à une prise de décision éclairée en matière de développement durable, d’adaptation aux changements climatiques et de gestion des ressources dans une région dotée d’importantes infrastructures minières et forestières. Ce projet de recherche s’inscrit dans le Programme de géosciences environnementales 2024-2029 chapeauté par la CGC-Québec et vise à créer un atlas numérique unique des données environnementales de référence pour l’EA.

15 h 50

Mot de la fin