Le Québec est régulièrement classé parmi les territoires les plus favorables à l’exploration minière dans le monde. C’est le fruit d’un écosystème associant le public et le privé, les explorateurs, les producteurs, les consultants, les éducateurs, les chercheurs, etc. Cette séance mettra en lumière quelques faits marquants de l’histoire minière du Québec afin de mieux envisager le futur de l’industrie.
Succès et défis du Québec minier ou comment le Québec a su se classer parmi les premiers territoires d’exploration minière dans le monde
Mardi le 19 novembre 2024
Salle 301B - COREM
9 h 30
Les marches minières face aux révolutions industrielles : le cas du Québec
UQAM
La distribution des ressources minérales dans le monde est inégale du fait des contraintes géologiques, mais aussi en raison du développement historique des empires industriels. L’histoire globale reconnaît ainsi un cœur, une semi-périphérie et des périphéries dans chaque empire continental. En semi-périphérie, les marches minières présentent une économie diversifiée, marquée par la fourniture de produits semi-finis au cœur. Cette dépendance partielle permet souvent une plus forte flexibilité et créativité que le cœur. C’est le cas du Québec par rapport aux États-Unis, mais aussi de l’Irlande vis-à-vis de l’Angleterre ou de l’Ukraine face à la Russie.
Les révolutions industrielles vécues en Occident s’appuient sur l’accès à de nouvelles ressources minérales. La première révolution a lieu au Royaume-Uni au XVIIIe siècle et repose sur le fer et le charbon pour développer la machine à vapeur et l’industrie textile. La seconde a lieu dans l’Est des États-Unis et en Europe à la fin du XIXe siècle et mobilise pétrole et métaux usuels pour intensifier l’électrification et l’utilisation du moteur à combustion interne dans l’automobile. La troisième arrive dans les années 1970 dans l’Ouest américain et au Japon avec l’expansion de l’électronique et de l’informatique qui exigent la production de métaux technologiques diversifiés. Enfin, la quatrième révolution industrielle s’annonce aujourd’hui comme l’interconnexion des technologies numériques, physiques et biologiques, ce qui nécessite l’utilisation des métaux critiques et stratégiques (MCS).
Toute révolution industrielle déstabilise les marches minières par l’arrivée de nouveaux défis. Il s’agit de reconfigurer les chaînes de valeurs, depuis l’extraction des matières premières jusqu’aux des produits presque finaux. Lors de la deuxième révolution industrielle, le Québec profite de la guerre civile américaine et de son accès privilégié aux capitaux britanniques et américains pour construire rapidement une expertise minière dans les Appalaches. Au cours de la troisième révolution industrielle, le développement de l’Abitibi et de la Côte-Nord permet de répondre aux besoins en Cu, Zn, Ti, Al et Fe grâce à des investissements internationaux de compagnies majeures et à une volonté politique affirmée des gouvernements, appuyée par le Royaume-Uni et les É.-U. Puis, ce sera le Québec qui préfigurera l’essor des MCS avec la mise en production de mines de niobium à partir de 1953.
Ainsi, ce qui caractérise la marche minière du Québec, c’est fondamentalement la continuité des investissements étrangers, l’acquisition précoce d’un savoir-faire industriel, la stabilité politique et la volonté continue d’appui des gouvernements ainsi qu’un goût pour l’innovation créatrice de richesse.
9 h 50
La diversification des ressources minérales exploitées au Québec : un objectif paragouvernemental prépondérant depuis 1966
UQAM
Quoique des ressources minérales aient été exploitées au Québec depuis l’époque coloniale, ce n’est qu’au milieu des années 1960 que l’on voit émerger des sociétés paragouvernementales dont l’objectif premier était d’assurer une diversification des ressources minérales exploitées dans la province. Cet objectif est d’ailleurs clairement établi en 1965 dans le rapport qu’André Marier soumet à René Lévesque pour faire suite à la requête commandée par ce dernier en 1962. S’en suit la création de sociétés d’État dont une minière, la SOQUEM. La direction de celle-ci sera confiée à l’ingénieur géologue Côme Carbonneau. Celui-ci venait de faire ses preuves à titre de vice-président de la junior abitibienne St Lawrence Columbium, première entreprise au monde à exploiter et surtout réussir à vendre du pyrochlore. En effet, la seule source de niobium pour la métallurgie était auparavant la colombo tantalite. En 1972, ce souci de diversification prend davantage d’envergure lors du démarrage du projet hydroélectrique de la Baie James. Une nouvelle société paragouvernementale, la SDBJ, est créée pour assurer le développement minier de ce territoire particulier. Au début des années 2000, le fonds de travailleurs de la FTQ est mis sur pied pour œuvrer directement à cette diversification afin de pérenniser les emplois dans cette industrie.
10 h 10
Modèle générique du développement des régions minières : émergence, boum et maturité
Les régions minières constituent des pôles majeurs de l’activité économique dans de nombreux territoires. Les facteurs qui agissent dans l’émergence et l’évolution de ces régions doivent être compris pour mieux explorer et prévoir le potentiel minier à long terme.
Basée sur l’analyse statistique des découvertes minières d’une région, l’approche proposée met en évidence la dynamique du phénomène de découverte dans le temps. Cette méthode, élaborée à partir de 130 mines du nord-ouest québécois (Lulin, 1990), a été actualisée et étendue aux quelque 300 mines identifiées depuis 1666 au Québec.
L’évolution anticipée est confirmée pour les principaux camps miniers : pas d’augmentation notable du nombre de mines, mais extension à grande profondeur de gisements déjà connus en surface (LaRonde, Canadian Malartic-Odyssey, Horne 5). Le facteur inédit, qui vient prolonger de façon considérable la durée de vie des camps miniers auparavant considérés comme matures, est la redéfinition du potentiel en surface fondée sur de nouveaux modèles géologiques et miniers (Canadian Malartic).
Les données ont été traitées comme suit :
- Construction de courbes cumulatives des découvertes minières en fonction du temps, les courbes étant différenciées par principale méthode de découverte : directe (prospection) et indirecte (cibles à distance identifiées par géophysique, géochimie, géologie).
- En parallèle, représentation de la profondeur du sommet et de la base de chaque gisement par rapport à la surface.
Cette approche conduit aux résultats suivants :
- De forme typique en « S », les courbes établies en fonction des méthodes de découverte montrent les phases d’émergence, de boum, puis de stagnation des taux de succès.
- Dans la plupart des camps miniers, trois principaux cycles se succèdent : stade initial avec gisements en surface découverts par méthodes directes, stade intermédiaire avec gisements cachés découverts par méthodes indirectes (surtout géophysiques), et stade mature avec méthodes indirectes composites (géophysique, géologie 3D, etc.) pour des gisements à sommets plus profonds (< 200 m sous la surface).
- L’efficacité des méthodes de découverte appliquées (avec succès) dans une région donnée est destinée à diminuer avec le temps. Les gisements découverts répondant adéquatement à ces méthodes viennent réduire le potentiel résiduel dans le volume évalué par ces méthodes.
Si chaque découverte individuelle apparaît comme le résultat de circonstances particulières, l’approche statistique fait ressortir cet évènement comme faisant partie d’une chaîne de causalité. De l’échelle locale à mondiale, les facteurs identifiés dans l’émergence des boums miniers sont : découverte d’un gisement majeur initial (« gisement fondateur »), nouvelles technologies et concepts d’exploration, hausses du cours des métaux.
10 h 30
Pause
10 h 45
Promouvoir le potentiel minéral en s’appuyant sur la connaissance géoscientifique : le programme Grand Nord 1997-2003
Les retombées du programme Grand Nord démontrent de façon convaincante l’efficacité de l’acquisition de connaissances géoscientifiques comme outil promotionnel. Dès le début de ce programme d’une envergure sans précédent, les investissements privés en exploration minière au Nunavik ont été mesurés. Au fil des ans, la diffusion de nouvelles données publiques s’est traduite par une augmentation sensible des dépenses d’exploration. En 2009, un an après la publication du rapport final, le nombre de titres miniers octroyé au Nunavik avait triplé.
En 1997, ouvrir le Nunavik à l’exploration représentait un défi considérable. Pour arriver à cartographier 21 feuillets au 1/250 000 en 6 ans dans le but de produire une carte géologique unifiée d’un territoire méconnu et isolé, il a fallu amorcer un rapprochement et tisser des liens de confiance avec plusieurs individus, communautés et entreprises inuites. Accorder de l’importance à cet enjeu dès le départ a été l’une des clés du succès du programme Grand Nord.
Encourager la migration historique des activités minières vers le Nord n’aurait pas non plus été possible sans des changements majeurs à la structure administrative de Géologie Québec. Développer la capacité organisationnelle et logistique d’intervention en milieu nordique de cette direction générale du ministère des Ressources naturelles a nécessité l’adoption d’une gestion horizontale. Des investissements récurrents dans le SIGÉOM ont aussi été consentis pour diffuser rapidement et dans un format numérique les données, les cartes et les rapports découlant des interventions de terrain, des levés géophysiques aéroportés et des analyses géochimiques et géochronologiques réalisées en laboratoire.
Le développement du réseautage institutionnel a aussi permis au programme Grand Nord de contribuer à former une relève scientifique de haut niveau, rompue aux particularités du Nunavik.
En définitive, le programme Grand Nord, mis sur pied afin d’attirer des investissements privés au Québec plutôt que dans d’autres territoires a démontré que l’acquisition de connaissances géoscientifiques est un outil promotionnel efficace.
11 h 10
L’Institut national des mines : un institut de recherche québécois dédié au développement d’une offre de formation minière se classant parmi les meilleures au monde
Institut national des mines
Constitué en 2010 pour soutenir le gouvernement du Québec dans l’exercice de sa responsabilité en matière d’éducation dans le secteur minier, l’Institut national des mines veille depuis sa création à analyser les besoins de formation actuels et futurs du secteur minier du Québec afin de répondre aux besoins de l’industrie et s’assurer que la formation minière d’ici demeure parmi les meilleures au monde. Dans le cadre de cette conférence, la présidente-directrice générale de l’Institut national des mines, Mme Christine Duchesneau, présentera l’organisation, le fondement de sa crédibilité et de sa notoriété au fil du temps, l’approche partenariale distinctive déployée par l’organisme afin d’unir l’ensemble des acteurs concernés en synergie et, concrètement, de quelle manière les travaux de l’organisation ont contribué à soutenir le secteur minier dans la recherche de solutions innovantes à ses défis.
Par la suite, M. Nicholas Théroux, conseiller à l’innovation et à la recherche à l’Institut national des mines, conclura la conférence en présentant un exemple de la façon dont les travaux de l’Institut se déploient et contribuent à influencer le développement de l’offre de formation minière du Québec. Il nous exposera une nouvelle programmation de recherche de l’Institut portant sur l’évolution de la formation minière québécoise au regard des compétences requises pour réaliser le traitement de certains MCS (lithium et graphite).
11 h 30
Perspectives des femmes d'influence : entretien avec des femmes de l'industrie minière au Canada
Université de Waterloo
Selon l’État du marché du travail dans l'industrie minière canadienne (2024), publié par le Conseil des ressources humaines de l'industrie minière (RHiM), les femmes représentent environ 16 % de la main-d'œuvre de l'industrie minière canadienne, contre 48 % pour l'ensemble des industries. Depuis 2001, le nombre de femmes dans l'industrie minière est resté relativement inchangé. L'industrie minière canadienne compte actuellement le plus petit nombre de femmes occupant des postes de direction au sein d'une entreprise parmi tous les groupes industriels. Les raisons de la faible représentation et de la faible participation des femmes sont multiples. Selon le RHiM, de nombreuses jeunes femmes déclarent que le manque de familiarité avec l'industrie et les perceptions négatives de l'emploi dans le secteur constituent des obstacles importants à leur entrée dans les domaines miniers.
Les chercheurs reconnaissent depuis longtemps l'importance des modèles féminins et des exemples d’occasion de recrutement et de conservation des femmes dans les domaines STIM. Entre 2014 et 2015, la Société de la métallurgie et des matériaux (MetSoc) de l'Institut canadien des mines, de la métallurgie et du pétrole (ICM) a parrainé un projet d'histoire orale visant à reconnaître et à documenter les carrières des femmes dans le domaine des mines, de la métallurgie et des matériaux au Canada. Le projet a abouti à la publication d'un livre, Women of Impact (Femmes d'influence), et à un symposium célébrant les histoires inspirantes des femmes dans ce domaine. Sept ingénieures actives dans l'industrie minière au Canada ont participé au projet. Leurs expériences et leurs connaissances révèlent les défis et les possibilités d'accroître l'égalité des genres dans l'industrie minière, les problèmes et les obstacles auxquels les femmes ont été confrontées et continuent de l'être, ainsi que des observations précieuses sur les politiques et les mesures susceptibles d'améliorer la participation et la conservation des femmes dans ce secteur. De même, ces récits riches et éloquents offrent des témoignages précieux sur les perspectives et les carrières enrichissantes qui s'offrent aux femmes dans l'industrie minière au Canada.
12 h