Caractérisation de l’ancien site minier d’exploitation d’amiante Frontenac
Le Québec a été le plus important producteur d’amiante du monde durant tout le 20e siècle. Les régions de Val-des-Sources et de Thetford Mines se sont développées grâce à ce minéral et ont propulsé le Canada au premier rang des exportateurs d’amiante.
Néanmoins, l’avancement des connaissances scientifiques et la démonstration de la toxicité de l’amiante sur la santé humaine ont entraîné le déclin de l’utilisation de cette substance à l’échelle mondiale à partir des années 1990. Les activités d’exploitation des mines d’amiante ont complètement cessé au Québec en 2012. La majorité des sites miniers d’exploitation d’amiante n’a pas été restaurée par les sociétés qui en étaient les exploitants, l’exploitation ayant souvent pris fin avant 1995, soit avant l’introduction des obligations de restauration dans la Loi sur les mines. La fermeture de la dernière mine d’amiante au Québec ainsi que les diverses interdictions et restrictions législatives et réglementaires n’ont pas pour autant éliminé la présence de cette matière dans l’environnement.
Ces anciens sites miniers ont laissé derrière eux des haldes, ces montagnes artificielles de résidus miniers amiantés (RMA). La migration de fibres d’amiante et de contaminants potentiels dans l’air et l’eau provenant de ces haldes représente un risque, et certaines haldes montrent des signes d’instabilité géotechniques.
Cette situation pose au gouvernement du Québec des défis, dont certains ayant trait à la santé des populations, à la sécurité des travailleurs et travailleuses et à l’environnement. Par ailleurs, les projets de valorisation des résidus miniers amiantés offrent aux régions des possibilités de développement économique à explorer de manière cohérente avec les enjeux de santé et d’environnement.
C’est dans ce contexte que le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) confiait au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), en septembre 2019, le mandat de produire un état des lieux sur la gestion de l’amiante et des RMA au Québec.
Dans son rapport, déposé en juillet 2020, intitulé « L’état des lieux et la gestion de l’amiante et des résidus miniers amiantés », le BAPE recommandait au gouvernement du Québec diverses actions visant notamment le développement d’un cadre de valorisation des résidus miniers amiantés et de gestion de l’amiante. De ces recommandations a découlé le plan d’action gouvernemental 2022-2025, intitulé « Amiante et résidus miniers amiantés au Québec : vers la transformation d’un passif en un actif durable » dévoilé par le MELCCFP en juin 2022. La mesure 7 de ce plan, proposée par le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF), vise l’élaboration d’un projet pilote de restauration d’un ancien site minier d’amiante. La première phase du projet, financée à hauteur de 6 M$, est d’entreprendre des études de caractérisation environnementales et géotechniques menant éventuellement à l’élaboration d’un scénario de restauration.
Une des particularités des sites miniers d’amiante dans la région de Thetford Mines est qu’ils sont, pour la plupart, situés sur des terres privées et que les résidus miniers sont des biens privés appartenant aux anciens exploitants miniers qui peuvent avoir des obligations concernant la restauration du site ou à des citoyens et citoyennes qui ont fait l’acquisition de ces terres et qui n’ont pas d’obligation de les restaurer en vertu de la Loi sur les mines. Les travaux de caractérisation et de restauration de ces sites miniers amiantés ne peuvent pas être effectués sans l’accord de ces propriétaires.
Dans ce contexte, le MRNF a procédé, au printemps 2023, à un appel de projets destiné aux propriétaires concernés par la présence de RMA sur leur terrain. Pour être admissibles, les propriétaires ne devaient pas être d’anciens exploitants du site proposé ni avoir d’obligation de restauration en vertu de la Loi sur les mines pour ledit site.
Le 9 janvier 2024, Québec a fait l’annonce du projet retenu. L’entreprise Les Sables OLIMAG s’est vu octroyer une aide financière et technique maximale de 6 M$, s’échelonnant sur deux ans, pour caractériser le site Frontenac, situé à East Broughton, en Chaudière-Appalaches. Il s’agit d’un ancien site minier d’exploitation d’amiante qui a été en activité depuis la fin du 19e siècle jusqu’à 1958. Le site du projet couvre une superficie considérable de près de 20 hectares.
Les études de caractérisation représentent les étapes préalables à la restauration d’un site minier. Les travaux de caractérisation se réaliseront sur le site jusqu’en mars 2025 et visent à permettre l’élaboration de divers scénarios de restauration. Ils vont consister, sans s’y limiter, à la réalisation des évaluations environnementales approfondies de l’aire industrielle du site, de la caractérisation détaillée des propriétés physico-chimiques et géotechniques des matériaux présents et de l’étude des milieux naturels à proximité qui sont potentiellement touchés.
Les objectifs du projet pilote sont multiples : acquérir des connaissances techniques et scientifiques en ce qui a trait aux aspects environnementaux et géotechniques des RMA, développer une expertise gouvernementale et régionale quant à la restauration des anciens sites miniers d’exploitation d’amiante, etc. Le développement de ce savoir-faire permettra également d’élaborer, à moyen terme, des concepts de restauration viables et exportables, notamment pour le site d’Asbestos Hill, situé au Nunavik, et qui est sous la responsabilité de l’État.